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À la suite de mon précédent article, il me semble important de définir maintenant ce qu’est l’UX Design (Design d’eXpérience Utilisateur) et par extension, un UX Designer.
Dans son article sur l’éducation du Design ( Moholy-Nagy’s Design Pedagogy in Chicago (1937-46)(1937-46)”), Alain Findeli annonce la couleur :
“Anybody who has been confronted with design education would readily admit that proposing a satisfactory definition of Design is a rather risky, if not impossible, enterprise. It’s definition indeed depends on whether design is considered to be an idea, a knowledge, a project, a process, a product or even a Way-of-being”. Toute Personne qui a été confrontée à l’enseignement du design admettra que donner une définition acceptable du Design est une entreprise risquée, voire impossible. Cette définition dépend en effet de si l’on considère le Design comme une idée, une connaissance, un projet, un processus, un produit ou une manière d’être.
Il semble donc clair que j’entreprends un voyage risqué dans cet univers de la définition du Design d’eXpérience Utilisateur. Je pense néanmoins que faire cette démarche est une étape nécessaire pour définir ma propre pratique et l’expliquer aux personnes qui ne sont pas dans la même industrie.
Il est réducteur de décrire l’UX Design comme “l’ergonomie” ou “le graphisme”. De même qu’il est réducteur de le décrire comme le Web Design ou le Design d’applications.
Au vu de l’ampleur de l’entreprise, plutôt que de proposer 1 seule définition fédératrice, je te propose de décrire l’UX design suivant 5 angles différents.
Voilà où en est ma réflexion.
Définition 1: L’UX Design comme design de l’expérience utilisateur
La définition la plus immédiate, la plus proche de l’essence même de l’UX Design consiste à dire que l’UX Design est le Design de l’Expérience Utilisateur, au même titre que le Design Produit est le Design d’un “produit”. L’UX Design est alors une discipline du Design, dont l’expérience Utilisateur est la plastique — le matériel — sur lequel le Designer travaille.
Définissons donc ce qu’est l’eXpérience Utilisateur : comme l’explique Marc Hassenzahl, elle se comprend par une transformation récente de la société : le passage d’une société de consommation de produits à une société de consommation d’expériences.
Cette évolution vers une société de l’expérience a d’ailleurs été anticipée et reconnue par d’autres domaines que le Design. Le business et le marketing par exemple.
Jared Spool, quant à lui l’a décrit comme le vide qui existe entre plusieurs activités (ou tâches) et vécu entre un client et un service proposé. Il prend l’exemple de “l’expérience” vécue à Disneyland Paris, où les différents “manèges” sont dissouts dans l’expérience globale “Disney”.
Définition 2: UX Design comme outil de résolution de problèmes — principalement numériques
Par définition, le design est une méthodologie créative de résolution de problèmes grâce à 2 temps clés : la reformulation et repositionnement du problème, et l’exploration de l’espace de la solution pour en dégager une “bonne” solution.
Évidemment, Le Designer n’est pas le seul à avoir pour vocation la résolution de problèmes. Pour être honnête, toutes les professions de services et scientifiques sont des professions de résolution de problèmes. Ce qui rend le Designer unique est la nature des problèmes qu’il résout : les problèmes résolus par le Design sont en essence non déterministe (voir la définition des Wicked Problems).
Wicked problems are a class of social system problems which are ill-formulated, where the information is confusing, where there are many clients and décisions masers with conflicting values, and where the ramifications in the whole system are thoroughly confusing. Les problèmes non déterministes sont une classe de problèmes mals définis dans les sociétés humaines, avec de nombreux décideurs ayant des intérêts divergents, et où les ramifications profondes dans l’ensemble du système sont parfaitement déroutantes.
La démarche mise en place assure un résultat meilleur que l’absence de la démarche de design (mais n’assure pas le meilleur résultat possible). Ceci étant dit, la solution proposée par le Designer n’intégrera pas toutes les contraintes exprimées, mais définira l’essence de ce qui est produit. Le designer tend à ce maximum en explorant l’espace du problème puis l’espace des solutions, de manière itérative et (souvent) visuelle. La construction de Sketches et prototypes, comme réalisation concrète, la connaissance des limitations et possibilités du matériel utilisé (dans notre cas, l’expérience).
C’est le non-déterminisme de la résolution qui inquiète les clients.
Un petit aparté ici. Dans ma précédente mission, j’étais dans un environnement où le design est fondamentalement incompris. (Cf le précédent article). Lorsque je me présente comme Designer d’UX, je suis confondu avec les ergonomes, ou les graphistes, aux objectifs tout aussi inconnus, mais aux résultats plus perceptibles. En tous les cas, la plus-value de mon intervention n’est pas vraiment perçue, car on considère que :
- je vais proposer une solution non faisable,
- je vais passer plus de temps pour trouver une solution disponible sans mon intervention.
Au cœur de ces problématiques est une peur de l’inconnu, domaine où nous, Designers — baignons naturellement — et qui fait notre force.
Définition 3: UX Design comme profession multidisciplinaire
Étonnement, une activité aussi floue que l’UX Design se divise en de nombreuses compétences ou disciplines, toutes plus ou moins bien définies :
- Le Design d’Interaction,
- L’Architecture d’Information,
- Le Visual Design ou Design Graphique.
De nombreux autres domaines sont aussi présents, soit au cœur de la pratique d’UX Designer, soit en guise d’inspiration :
- L’ergonomie cognitive
- Les sciences humaines
- La gestion de projet
- Le développement front-end
- L’architecture
- Le Designer Produit
- Le Design de service
- Et tant d’autres !
Ces professions, sans faire partie intégrante de la démarche du Design, sont autant de disciplines que l’UX Designer doit connaître, sinon maîtriser.
Les disciplines de l’expérience utilisateur par Dan Saffer
Le Designer d’UX a une compétence en T.
Il est attendu d’un Designer d’UX qu’il est une pratique en T :
- Avoir des connaissances généralistes plus ou moins appliquées sur un grand nombre de domaines, de l’ergonomie au développement front-end, en incluant des connaissances en psychologie, en typographie, en design print, en conception d’interfaces graphiques, etc.
- Mais surtout avoir une compétence clé dans sa pratique qui le rend unique.
Facilitateur et créateur de conversation
Dans un profil d’UX Designer, une force est la capacité à dialoguer avec toutes les personnes présentes, à faire la traduction et la facilitation entre les corps de métiers. Ceci justifie aussi pourquoi il doit être capable de comprendre toutes ces disciplines.
Définition 4: UX Design comme philosophie et culture d’entreprise
Une fois le Design installé au sein de l’entreprise, cette dernière est radicalement transformée dans ses fondations. Des indices qu’une entreprise a réalisé sa “mutation” expérientielle sont :
- Les barrières entre les différents départements tombent,
- L’ensemble des départements est intégré à la conception globale de l’expérience client (Customer Experience ou Cx),
- Une vraie culture globale, disruptive, créative, prônant l’acceptation de l’échec, est présente au sein de l’entreprise [CF le schéma de maturité d’une entreprise en terme de Design].
Une fois les avantages de l’UX Design compris, l’adoption peut être rapide.
Définition 5: UX Design comme acteur du changement
Évidemment, toutes les entreprises ou organisations n’ont pas atteint une maturité pleine et entière de l’UX Design. Pour les entreprises qui sont séduites par la démarche du Design, L’UX Designer sert alors de catalyseur, créant une réaction en chaîne là où il passe, améliorant la maturité globale de l’entreprise.
Voilà ce que je considère comme étant le Design d’eXpérience Utilisateur, et ce que je considère faire au jour le jour dans ma pratique du Design d’UX.